[Restauration] Le bar des tempêtes

Mari oublia rapidement le barman en détournant sagement le regard. Elle espérait qu’ainsi, aucune pulsion malhonnête ne vienne voiler le charmant tableau de sa rencontre avec le violoniste.
La jeune femme se tourna alors tout naturellement en direction du garçon.

Pourquoi ce cocktail me va-t-il bien ?

Elle laissa la question en suspens, une conversation dans la conversation auquel les deux pourraient se donner loisir à répondre lorsque cela les enchanterait.

Alors pour les marionnettes, oui je les fais moi-même. Je pensais à une histoire pour les enfants. J’aime bien les enfants, leurs réactions sont toujours spontanées si bien qu’ils aiment ou pas, tu le sais tout de suite. Puis quoi de plus merveilleux que le visage illuminé d’un gamin devant un beau spectacle. C’est aussi ce que j’aime chez eux. Le plaisir perdure longtemps, chaque détail leur reviendra plus tard, lors de leur sommeil, d’ennui et lorsqu’ils joueront aussi.
Donc, une histoire avec des animaux qui parlent, et une petite fille, enfin ça peut être un petit garçon aussi. Qui les rencontrerait par hasard et de là s’en suit toute une épopée comique. Il faut juste trouver les éléments dramatiques pour faire avancer l’histoire.

Naoki appréciait au maximum son arrivée. Tout le monde avait l’air si sympathique ici et le garçon se sentait vraiment bien. Le barman s’occupait alors d’eux et de leurs commandes. Tout se passait donc à merveille. Naoki écoutait attentivement l’explication de la jeune femme.

« Moi aussi, j’adore les gosses… Je trouve ca tellement marrant et comme tu dis, ils comprennent vraiment toutes les choses de la vie, et des fois bien mieux que pourrait le faire un adulte. Je suis donc d’accord avec ton scénario, j’aime bien les animaux en plus… »

Il relancait une fois de plus son petit sourire naturel, celui qui revenait lorsqu’il se sentait bien. Puis il reprenait sur la question de la jeune femme…

« Je sais pas… tu t’appelle Mari… et Bloody Mary ca te va bien… je trouve… »

Franchement lancée sur la mise en forme du spectacle, Mari semblait devenue comme impossible à arrêter. Un nombre affolants d’idées surgissant dans son esprit.

Donc ensuite pour la musique. J’avais pensé à un thème musical assez sobre tu vois. Il ne faudrait pas que cela devienne trop présent sinon les enfants auraient bien trop d’informations à gérer en même temps. Par contre, il faut que ce soit suffisamment là pour éveiller leur sens auditif, et stimuler la réflexion. Je ne sais plus où j’avais lu ça, mais il parait que le cerveau réagit mieux et avec plus de sensibilité aux éléments extérieurs s’il est maintenu par un fond musical. Je pense que de cette façon, les gamins pourraient plus facilement comprendre ce qui se passe et éveiller leur imagination.

Laissant une pause dans son exposé, Mari pointa brièvement les yeux au ciel en mimant des guillemets de part et d’autre de sa tête.

Et qu’est-ce que j’ai de « Bloody » ?!

Puis elle retourna à son exposé.

Et quel est ton avis sur le nombre d’instruments ? Juste un violon ? Ca pourrait être pas mal. Ca donnerait un style champêtre, façon théâtre de rue ou quelque chose dans ce genre. Je me demandais aussi si inclure de vraies personnes dans le spectacle serait une bonne idée ou non.

Au fur et à mesure que la jeune femme parlait, Naoki réfléchissait à un thème musical qui pourrait coller avec l’idée qu’elle avait. Il avait déjà sa petite idée, mais il attendrait pour lui montrer comment il joue. Pour l’instant, il prenait des notes dans sa tête pour être sur de faire ce qu’il faut.

« Quelque chose de léger et présent quand même… Je comprends bien ce que tu veux et j’essaierais de faire de mon mieux alors. Cela va faire du bien à mon violon que je recommence mes élucubrations musicales ! »

Sa main se passait sur son menton, cela indiquait qu’il réfléchissait. Il attrapait son verre et buvait une gorgée de son verre de Pina Colada… Il se tournait vers le Barman.

« Hum… excellente cette Pina Colada, mes félicitation ! »

Puis il se retournait vers Mari avec un grand sourire…

« Le violon suffirait oui… En fait… euh… je ne sais pas pourquoi Bloody, mais ca te va bien je trouve… Un petit coté fatal peut être ! »

Génial ! J’ai hâte d’entendre ça.

Mari jeta un petit coup d’œil en direction d’Heion et de son singe pour voir où en était son verre qui commençait à tarder. En fait, elle se doutait qu’il mettrait du temps à lui servir mais après tout, elle avait gagné, et sa récompense était bien cela, si bien qu’elle se mit à pianoter sur le bar en laissant ses ongles marteler le bois de façon bruyante.

Alors dis-moi, ça fait combien de temps que tu joues du violon ? As-tu été en représentation déjà ?

Puis elle dirigea son regard en plein dans celui du garçon en prenant un air instigateur.

Et je respire la fatalité tant que ça ?

Naoki buvait encore une gorgée de ce fameux breuvage. La pina colada du Barman était excellente, les proportions étaient tout simplement parfaite. Le mélange du rhum blanc et du rhum brun était excellent pour les papilles du garçon. Le jus d’ananas était justement dosé et le lait de coco adoucissait l’alcoolisation du cocktail. Une saupoudrée de cannelle venait sucrer le tout. C’était tout simplement délicieux et le garçon se régalait de chacune des gorgées de ce cocktail divin.

« Vois tu, je considère le violon comme un instrument d’une extrême finesse. Celui-ci demande un doigté parfait. D’un simple tremblement de mon doigt, je peux jouer faux une note qui devrait être juste. C’est cela que j’aime le plus dans le violon, toujours sur le fil, toujours prés à vaciller. »

Naoki était vraiment attaché à son instrument, et il le connaissait si bien qu’il aurait pu en parler des heures et des heures. Son touché lui avait valu d’ailleurs quelques récompenses dans son village. Il était d’ailleurs professeur dans la plus grande école de musique de Suna no Kuni. Il attrapait rapidement une cigarette et l’allumait avant de la porter à sa bouche. Une odeur de vanille venait parsemé la fumée qui se dégageait de sa bouche, comme si ces cigarettes en était parfumées.

« Oui, j’ai fais plusieurs concerts déjà… J’étais reconnu dans mon village, mais cela n’a pas d’importance. Ca ne fait pas la qualité d’un musicien voit tu ? Je joue depuis que j’ai cinq petites années, cela fait donc…euh… treize ans déjà… »

Il passait sa main gauche derrière sa tête. Encore cette habitude qui revenait encore et encore. Il posait sa cigarette dans le cendrier devant lui et buvait encore une gorgée de son verre. Puis il continuait son explication, revenant sur la question de la jeune femme…

« Il faut croire tu parais fatale comme jeune femme… Mais cela n’est pas un défaut tu sais ! »

Mari écoutait attentivement, pleine d’admiration pour ce garçon qui n’était pas beaucoup plus vieux qu’elle et déjà plein de talent, agissant comme un grand. Alors qu’elle, ne faisait que souligner la moindre intonation de sa voix avec des yeux emplis de merveilles et un sourire admiratif. Elle buvait les mots de Naoki, s’amusait parfois à le titiller, ou relançait la conversation. Un garçon vraiment charmant en fait.

Et tu as déjà les réflexes de l’artiste célèbre. Tu parles, tu parles, tu parles avec tant d’enthousiasme et de professionnalisme et entre deux phrases tu allumes une cigarette. C’est mignon !

La jeune femme échappa un rire discret, roulant une nouvelle fois des yeux en direction du barman, puis, calmement, se retourna vers Naoki.

En tout cas, chapeau bas pour maintenir la flamme depuis ces treize années, surtout pour un autodidacte. Tu devais jouer dans un orchestre alors ? Soliste ?

Puis la suite était sortie toute seule, le résultat de son admiration pour le violoniste.

Et, tu penses que tu pourrais m’apprendre la musique et le violon ?

Si ce n’est pas un défaut ? C’est une qualité ?

Ses yeux dans ceux de la jeune femme, il continuait son explication et finissait par s’arrêter. Puis il attrapait encore une bouffée de cette cigarette vanillée. Les yeux noisette du garçon suivaient des yeux le regard de son interlocutrice. Celle-ci semblait troublée par le barman, et curieusement Naoki y décelait facilement un sentiment de gêne. Mais il préféra laisser tombé et lâché un sourire qui détendrait peut être la jeune désertique. Mignon… le mot était sortit… celui qui le poursuivait depuis toujours. C’était le principal adjectif qui ressortait de Naoki : Mignon. Mais cela ne lui déplaisait pas, cela aurait été hypocrite de dire le contraire.

« Je jouais dans un petit orchestre, au poste de premier violon où violoniste soliste suivant l’appellation. Et oui, j’ai maintenu la passion pendant treize années et je compte bien continuer à évanouir mes sentiments les plus profonds dans des mélodies. »

Il buvait une gorgée, restant droit et posé comme à son habitude. Puis il se levait doucement et enlevait son veston pour finalement le ranger sur le dossier de son tabouret. Il se rasseyait et continuait…

« Oui je t’apprendrais la musique si tu le souhaite… Mais je te préviens, c’est un travail qui demande beaucoup de rigueur et de sérieux. »

Sa main se posait sur le bar, frappant un petit rythme latino qui lui donnait le sourire. C’était inné, ca venait de son sang, le tempo battait dans ses veines.

« Oui, comme tu l’as dis, si ce n’est pas un défaut, c’est une qualité ! »

Mari était convaincue, c’était déjà ça. Quel meilleur professeur pouvait-elle avoir à Shike si ce n’est le fameux Naoki de Suna, bien qu’il ne souhaite plus réellement entendre parler de son village natal.
Toujours pas de verre, la jeune femme était à la fois agacée et rassurée, car elle connaissait bien, trop bien peut-être même les légères nuances de comportement après avoir ingurgité quelques gorgées d’alcool. Un comportement qu’elle ne souhaitait nullement avoir en présence du musicien, du moins pour le moment car ils venaient à peine de se rencontrer.
Néanmoins, s’apercevant que l’atmosphère commençait à peser avec Heion si proche, Mari s’engagea dans une voix sans réelle issue si l’on ne la maitrise pas, une autodérision programmée qui devrait, du moins elle l’espérait, arracher un sourire à Naoki.

Se redressant bien droite sur sa chaise, l’adolescente tendit les mains en avant, comme examinant ses ongles telle une femme de la haute, en prenant un air suffisant et une voix des plus bourgeoises.

Et bien ma fois mon cher Naoki. Il me semble que vous venez publiquement de déclarer que je n’ai que des qualités. Et rassurez-vous mon ami, j’apprendrai la musique, car je suis toujours sérieuse et rigoureuse. Que dis-je ! J’incarne la sériositée !

Toisant le garçon de son air pédant, Mari ne put alors contenir le gloussement qui s’échappa en s’écoutant parler. En fait, s’il ne rigolait, elle avait au moins réussi à se détendre elle-même et peut-être même, voir sûrement, paraitre encore un peu plus idiote.

Lorsque Saru revint avec les différentes bouteilles nécessaires à la préparation des boissons demandées, Heïon s’attela rapidement à la tâche, en commençant par la pinacolada. Il saisit un shaker dans lequel il versa quelques gouttes de rhum blanc, quelques autres de rhum brun, une bonne dose de jus d’Ananas et un peu de lait de coco. Pour ajouté encore à l’onctuosité de l’ensemble, il déposa une demi cuillère à café de crème fraîche et agita vigoureusement le tout avant de le servir dans un verre. Petite touche supplémentaire, il saupoudra le tout de canelle et envoya le singe apporter le verre à l’élégant jeune homme pendant qu’il s’occupait du bloody Mary de Mari qui faisait mine de s’impatienter.

*…bon…ok mon grand…te loupes pas sinon elle va t’accuser de vouloir l’empoisonner…*

Si sûr de lui au cours de la préparation précédente, le malaise ambiant lui fit perdre quelques uns de ces moyens et c’est maladroitement qu’il dû s’y reprendre à trois fois pour finalement arriver au résultat escompter, ne faisant qu’accroître l’impatience de la kunoïchi qu’il évitait toujours de regarder. Une dose de vodka, une petite bouteille de jus de tomate une larme de jus de citron et deux gouttes de tabasco, le tout placé dans le shaker et agrémenté d’un peu de sel et de poivre avant de mixer énergiquement la recette ainsi obtenue. Il versa le liquide rouge sang dans un verre à coktail et envoya à nouveau le ouistiti à l’endroit où les autres étaient installés esquivant ainsi tout rapprochement malvenu vu la situation. Evidemment, Saru manqua de très peu de tout renverser sur la fille suite à une énième singerie, et le second verre arriva alors que le shinobi avait déjà commencé à siroter le sien…pas terrible comme timing.

*…Saruuuu…c’est vraiment pas le moment…p’tain, je fais n’importe quoi là…reprend toi Heïon…*

L’éviter était bien beau mais combien de temps cela allait il durer, surtout si les deux étaient amenés à travailler ensembles dans le futur. Mais en même temps, comment lui faire comprendre la désolation qui le tenaillait en repensant à ses agissements sans avoir l'air incommodant.

*…Déjà, pour commencer il ne sera pas dit que je n’ai pas de paroles…*

Etrangement, il n’en resta donc pas aux deux commandes et attrapa un grand récipient, genre saladier ainsi qu’un large verre.

*…pour rester dans l’exotique…un punch du même nom…*

Tandis que les autres continuaient leur discussion, il mélangea dans le saladier, rhum blanc, jus d’orange, sucre de canne, jus de pamplemousse, rhum brun et autres jus de fruits exotiques en plus de deux gousses de vanilles, le tout en grande quantité et savamment dosé. En tournant doucement le mélange à l’aide d’une louche, il en profita pour tendre l’oreille et se rendre compte que le jeune homme était effectivement un artiste. Une fois les ingrédients mixés à sa convenance, il utilisa la louche pour remplir le verre du breuvage et y adjoindre deux pailles ainsi que deux petites ombrelles. Pour embellir la décoration, il sortit un instant et revint avec une petite branche de lierre qu’il enroula autour du verre, glissant entre les jointures d’autres gousses de vanille afin d’associer le plaisir olfactif au gustatif. Cette fois c’est en personne qu’il se déplaça, toujours gêné aux entournures et ne sachant pas trop ce qu’il pourrait bien dire qui ne paraisse pas stupide ou inopportun. Une fois auprès des deux déserteurs, il déposa la boisson, et regardant avec un sourire le garçon :

" Voilà, c’est un petit extra…fait pour partagé à deux et durement gagné par ta compagne du moment…si vous en voulez encore, faites moi signe..."

Quelle banalité ! Sans attendre de réponse, il regagna l’arrière du comptoir en attendant de nouveaux arrivants et évitant toujours avec soin de croiser le regard de la kunoïchi.

Naoki saisissait son verre et le finissait d’une dernière traite, écoutant les mots de la jeune fille avec beaucoup d’attention. Il était si exquis de se détendre dans un tel endroit. Il en oubliait presque son identité et ses origines. Le pays du vent ne lui manquait pas du tout, bien au contraire, il ne souhaitait plus jamais y mettre les pieds et rester ici avec ses nouveaux amis. Attrapant sa cigarette vanillé, il levait ses fesses du tabouret et se plaçait alors au milieu du bar. Tous les occupant le regardait depuis son arrivé, il était donc prioritaire de se présenter.

« Bien le bonjour à vous tous. Je me nomme Naoki Murasaki. Je viens de déserter mon village, celui du sable et je compte m’installer parmi vous. Il me paraissait donc prioritaire de vous donner mon identité les amis… »

Un grand sourire aux lèvres, il se rasseyait et se servait une louche de la mixture de barman. C’était très bon et surtout plein de Rhum, ingrédient adoré du garçon. Puis il se tournait vers Mari…

« Non, je ne suis pas fou ! Juste heureux ma chère amie… »

Oui je crois pouvoir le constater.

La jeune femme haussa nonchalamment les épaules, le sentiment du devoir accompli dans le ventre. Il était heureux, elle l’était aussi, sûrement pas pour les mêmes raisons mais le principal fut qu’ils étaient sur la même longueur d’onde. Pour le moment, peu d’autres choses pouvaient la concerner et c’était tant mieux.
Engorgeant une nouvelle gorgée du cocktail promis par Heion vers qui Mari tourna les yeux en épiant ses gestes, elle se mit à rougir. Un peu d’alcool, de bonheur, de compassion, de rêves, un chouya de jalousie aussi et elle était vexée. Le singe échappé de son zoo semblait, malgré son malaise, réussir à soutenir la présence de la jeune femme. Elle aurait aimé qu’il rate quelque chose, juste pour le geste et par pur égoïsme. Puis se mit à penser que ce n’était pas bien, qui voudrait une telle chose, certes sa réaction lui avait paru ignoble, mais comment pouvait-il savoir ? L’adolescente sentait une tension étrange succéder à son bien-être, car en réalité elle savait pertinemment que ce n’était pas sa faute, qu’il cherchait juste des explications, que tout n’était à coup sûr que des coïncidences, mais elle avait mal, juste là où ça fait boum boum, et ne le supportait pas. Elle ne le méritait pas, et souffrir à ce point malgré toute la joie qu’elle affichait lui déplaisait au plus au point. En fait c’était cela, la jalousie d’être la seule à souffrir de ce qui s’est passé. Une blessure ou deux ? Ce n’est rien comparé à ce qu’elle ressentit à ce moment là.
Se rendant tout à coup compte que son ressentir entachait la conversation, Mari se ressaisit et regarda le Naoki d’un air patient. Un sourire en coin, haussement de sourcil, elle souffla.

He bien, j’attends votre audition monsieur le violoniste. Si vous êtes heureux, votre musique n’en sera que plus jolie.

Les portes du bar des tempêtes s’ouvrirent à la volée, poussées par Sendo qui s’engouffra violemment dans le troquet. Il déambulait dans le rade qui avait un certain standing depuis qu’Heïon avait prit les commandes. D’ailleurs, ou était le gnome ? Les yeux du Futago se posèrent immédiatement sur le comptoir, plus exactement derrière le comptoir…personne. Il s’accouda au zinc.

« Heïon ! »

Toujours personne, sa soif ne risquait pas de s’éteindre tout de suite. Enfin, une tête apparu dans l’encadrement de la porte de la réserve. L’Honpu remontait, les bras chargés. Sendo lui fit signe de s’approcher.

« J’ai soif ! Sers moi un truc costaud, et puis prend toi la même chose, c’est moi qui régale. »

Le temps que le gnome sorte l’alcool, le Nukekage improvisa quelques petits pas de danse sur la piste, faisant demi-tour sur lui-même. Il avait toujours aimé danser, d'ailleurs, il aimait chorégraphier ses combats.

A peine l’Honpou avait il gravit les dernières marches du petit escalier remontant de la réserve qu’il tomba nez à nez avec Sendo, Nukekage en titre. Cela faisait un bail maintenant qu’il ne l’avait pas croisé et encore plus longtemps que le Fuutago n’avait pas mis les pieds dans le bar des tempêtes. A vrai dire, il était rare qu’il se pointe ici et en y réfléchissant, Heion n’avait pas souvenir de l’avoir jamais rencontré dans cet endroit depuis qu’il en était le tenancier.

« J’ai soif ! Sers moi un truc costaud, et puis prend toi la même chose, c’est moi qui régale. »

Le jeune serveur arqua d’abord un sourcil étonné par la situation présente avant qu’il ne se détende plus sûrement, un rictus satisfait venant dès lors éclairer son visage. Là, Sendo venait de le prendre par les sentiments, et il n’allait pas se faire prier pour concocter aux deux protagonistes du jour un petit apéro qui devrait, à priori, bien lancer la soirée qui se profilait.
Tandis que l’autre s’éloigna vers la piste de danse pour faire profiter l’assemblée de quelques déhanchés bien sentis, le jeune homme interpella Saru, son petit singe qui ne le quittait que rarement et accessoirement son aide de comptoir.

« …Hey Saru, on a un invité de marque aujourd’hui, va falloir sortir l’artillerie lourde...rhum, saké, citron, sucre de canne…et ramène plusieurs bouteille, quelque chose me dit que la soirée va être longue… »

L’animal s’exécuta immédiatement et ramena tout le matériel nécessaire à la préparation d’un nouveau cocktail maison, le "récidiviste fatigué", nom choisi pour sa capacité à assommer les plus robustes des Nuke nin. Un tiers de rhum, un tiers de saké, un sixième de jus de citron et un sixième de sucre de canne servis dans des contenant grand comme deux fois la taille d’un verre à saké…du tout bon qui rend tout rond en somme. Mais tout l’intérêt de la boisson résidait dans la multiplication des verres, donnant alors tout son sens au mot récidiviste.
Ainsi, Heïon plaça face à face, de chaque côté du comptoir, deux rangées de vingt verres du dit cocktail, puis souleva la petite tablette en bois liée au reste du bar, il s’en extirpa et se dirigea vers le Nukekage qui profitait de l’attente pour chauffer encore un peu plus la piste. L’Honpou n’était pas un grand danseur à la base, mais aujourd’hui, il avait envie de se faire plaisir, et tout s’y prêtait en fait. Et puis, ne dit on pas que le meilleur moyen de tenir l’alcool est de dépenser une énergie équivalente à ce que l’on ingurgite. S’il avait l’intention de tenir plus longtemps que l’autre, il devait donc bouger un peu.
Croisant les jambes, il engagea un demi tour au bout duquel il laissa volontairement glisser le pied droit contre le sol tandis que la jambe gauche se repliait sur l’arrière et qu’une main se posait au sol pour maintenir l’équilibre de l’ensemble, la main libre pointant droit vers le Fuutago. C’est donc dans cette position à mi hauteur, un sourire au bord des lèvres que le garçon enchaîna :

« …Sendo, je te propose un truc…on fait celui qui tient le plus de verres de "récidiviste fatigué", et en même temps, comme t‘as l’air d’aimer danser, on alterne entre chaque verre par quelques pas, et tout ça chacun notre tour…si ça te dit je te laisse commencer… »

Heïon se redressa d’un bond, et tout en attendant que l’autre lance les débats, s’approcha du jukebox, puis cliqua sur la chanson désirée après quelques recherches:

« …En mettant ça en boucle, ça devrait nous motiver, qu’est ce que t’en penses…mais bon si cette musique est trop complexe pour ton style de danse on peut en changer hein… »

Il accompagna cette dernière remarque d’un sourire amusé. Il aimait les défis de se genre l’Honpou , et chambrer également, ça mettait un peu plus de piment à l’affaire et il se doutait bien de toute façon que l’autre ne resterait pas en reste.