Une demande urgente.

Miho s'était levée très tôt, ce matin là, à cause d'un terrifiant cauchemard. Dans son rêve, une armée de barbes à papa luttait à mort contre un graaaaaand monsieur habillé tout en blanc avec du sang sur les mains, une monsieur que Miho était certaine d'avoir déjà vu en rêve, et peut être en vrai, aussi, d'ailleurs. Quoi qu'il en soit, les barbes à papa se faisaient écraser, et aucune d'elle n'en sortit indemne. A la mort de l'ultime combattante, la petite princesse s'était réveillée en sursaut. Elle avait immédiatement fait une terrible constatation : les barbes à papa avaient disparu de la surface de la terre, la preuve, depuis la mort de Ryoko, elle n'en avait pas mangé une seule.

Dépitée par cette information, la petite fille était sortie en douce de la maison de sa grande soeur de substitution, et avait couru jusqu'à la demeure de la seule personne qui pourrait peut-être l'aider : le chef du village, Sendo Futago. Elle se jeta littéralement sur la porte, au terme d'une course éffrénée jusqu'à la case du Chef. La porte s'ouvrit, il ne prenait pas la peine de fermer à clé.

- KABE-SAMAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaa...

*Arf...*

Il dort mait. Ah, pauvre petite Miho qui n'avait pas pris la peine de réfléchir avant d'agir... Elle se retrouva, complètement paniquée par l'hypothèse de la réelle disparition des barbes à papa et par le fait de se trouver en compagnie d'un homme sûrement énervé. Mais quelque chose la marqua : il avait comme un air de Ryoko-sama... La mini désetrice s'en sentit toute chamboulée.

Pendant une demi-seconde, une lueur bizarre éclaira les yeux du Nukekage. Se faire surprendre le matin, ça ne lui avait jamais réussit. Mais son regard reprit son apparence vide de tout sentiment, et par la même occasion il releva la tête pour apercevoir : Miho. Qui d'autre qu'elle pouvait avoir cette voix de petite fille de toute façon ? La garde d'enfant n'était pas le fort des déserteurs en général. Mais cette enfant là avait le niveau d'un chuunin, et elle serait une carte maitresse pour Shike. Mais il manquait encore quelque chose à cette gosse, chose que Sendo n'allait pas tarder à éveiller...bientôt, c'était presque l'heure.

Mais...il fallait d'abord se lever. Il retomba en arrière, l'oreiller amortissant le choc, et resta le dos plaqué sur le lit quelques secondes.

"Miho-Hime-chan, tu es bien matinale."

C'est un Sendo en short qui se leva et approcha rapidement de la petite fille. Le trouble de la mini-désertrice se voyait comme le nez au milieu de la figure, et le Nukekage en fut vraiment peiné. Les enfant étaient comme lui : des instinctifs, et en général il avait un feeling particulier avec les gosses. Il se baissa pour être à sa hauteur et s'assit carrément par terre...et la première pensée qui lui traversa l'esprit n'était pas très rassurante.

"Quelqu'un t'a fait du mal ? Qu'est-ce qui se passe ?"

Pour se réveiller encore mieux, il alluma une cigarette et resta là, le dos collé au mur, assit par terre.

La tenue vestimentaire de Sendo laissa Miho circonspecte. Certes, il avait autant de muscles que Ryoko, mais Ryoko ne se promenait pas comme ça, et puis, et puis... bref, de toute façon ce n'était pas l'important, il y avait d'autres choses à faire dans ce monde de brutes que de s'interroger sur les habits de Sendo.

"Quelqu'un t'a fait du mal ? Qu'est-ce qui se passe ?"

Miho secoua la tête, comme chassant une mauvaise pensée. Elle planta son regard dans celui du beau chef des déserteurs, et répondit :

- Oui, un monsieur tout en blanc avec du sang sur les mains. Il a fait quelque chose de terrifiant. C'est horrible, j'ai eu des visions, et les barbes à papa ont disparu complètement, il n'y en a plus du tout, et sans barbe à papa je vais mourir.

Les grands yeux de Miho s'emplirent de détresse et de larmes, alors qu'elle jetait sur Sendo un regard suppliant, mode chat-potté mais en pire. Si les barbes à papa avaiant réellement disparu, alors l'avenir du monde s'en trouverait compromis. La petite fille reprit donc une grande inspiration, avant de murmurer :

- Dis moi, Kabe-sama, est-ce que tu la connais, toi, la technique ultime de Ryoko-sama ? Tu sais... celle qui fait apparaître les barbes à papa ?

Si le déserteur ne la connaissait pas, Miho vivrait des moments difficiles, car changer définitivement de régime alimentaire n'était pas très facile pour une gamine. D'un autre côté, elle grandissait, et quand on commence à euuuh... commencer à commencer à commencer à ressembler à une vraie fille, et bien on ne fait plus de caprices d'enfants. Mais personne ne savait, encore, donc l'argument du "je suis une toute petite fille" marchait encore.

Le regard vide d'expression de Sendo était toujours posé sur la gosse, et rien ne semblait pouvoir le troubler....sauf....

- Oui, un monsieur tout en blanc avec du sang sur les mains. Il a fait quelque chose de terrifiant.

Les poings de Sendo s'étaient serrés, sa machoire crispée, ses muscles étaient déja tendus pour un bond salvateur pour le village.

- C'est horrible, j'ai eu des visions, et les barbes à papa ont disparu complètement, il n'y en a plus du tout, et sans barbe à papa je vais mourir.

- Dis moi, Kabe-sama, est-ce que tu la connais, toi, la technique ultime de Ryoko-sama ? Tu sais... celle qui fait apparaître les barbes à papa ?

La main qui s'apprétait à venger le village et à tuer un homme se posa sur le front de Sendo, et l'autre sur celui de Miho.

"Miho-chan !"

Son ton s'était fait plus dur qu'il ne l'avait voulu, mais il avait eu peur...très peur.

"Ecoute...les barbe à papa, c'est fini...je ne connais pas la technique de ton papa."

Les yeux réprobateurs du Nukekage se posaient sur la gosse, alors qu'il avait toujours les main sur son front et sur celui de Miho.

"Mais...je connais d'autres trucs...."

Le tao du tigre...et immédiatement, un bonbon se matérialisa dans sa main qui une fraction de seconde auparavant se trouvait sur le front de la gamine. Ce bonbon était multicolore, apparement il avait plusieurs goûts, il ressemblait à un arlequin de couleurs. En fait, Sendo avait juste plongé sa main dans la poche de son short...mais il avait sauvé les apparences.

"Moi mon truc, c'est les bonbons ! Goûte-le !"

* Les barbes à papa, c'est fini... Les barbes à papa, c'est fini... Les barbes à papa... *

Miho restait plantée, les yeux fixant le vide, devant l'affreuse nouvelle. Si elle n'avait pas voyagé et connu un peu la vraie vie, la gamine aurait probablement éclaté en sanglots. Là, juste quelques petites larmes pour le salut des barbes à papa. Mais ce n'était pas la première fois qu'un symbole de la vie d'avant partait en fumée. Le temps des bisounours était révolu, la gamine devrait s'y faire. Dans les périodes de "marche ou crève", il n'y avait nulle place pour les caprices d'une petite fille, si mignonne soit elle. La vie est dure, mais c'est la vie. Mais vaut elle la peine d'être vécue sans Ryoko et sans barbe à papa ? Peut-être, peut-être, parce que Kabe-sama était presque aussi beau que Ryoko, et que le bonbon qu'il lui avait donné était presque aussi bon qu'une barbe à papa.

Miho leva les yeux vers le visage du chef des déserteurs, tout en dégustant son bonbon arlequin.

- Merci, Kabe-sama. Bon je vais rentrer chez Onee-chan, alors, sinon elle va s'inquiéter.

Avec une petite moue et un air tout désolé, Miho prit la direction de la porte. Mais elle s'arrêta, tout d'un coup.

- Je ne sais pas quoi faire, Kabe-sama. Toute la journée je m'entraîne ou je joue avec Rafiki-kun et Sherkan-san et le copain de ma grande soeur, mais je ne sais pas pourquoi, je m'ennuie. Avant, Muttsuri m'avait demandé d'aller lui chercher des fleurs, et c'était une belle promenade, et puis j'ai eu des bonbons, en échange. Mais là plus personne ne me demande jamais rien, et Rafiki aimerait se dégourdir plus souvent les jambes. Tu n'as pas besoin de fleurs, toi ?

Sendo vit à sa tête que la petite avait besoin de nouveaux repaires, de se reconstruire. Elle ne pouvait pas rester au pays des bisounours toute sa vie, sous peine de se faire avoir par le premier shinobi venu aux mauvaises intentions. Il était temps de mettre sa force à l'épreuve, de tester ses capacités, et enfin de grandir.

"Hime-chan, je ne veux pas de fleurs...je veux juste te parler. Reviens me voir s'il te plait."

La gosse s'exécuta, le Nukekage était toujours par terre.

"Tu es consciente que tu es plus forte qu'au moins dix hommes ? Tu sais...si ton père est mort, et si mon frère est mort, c'est parce qu'on a pas pu les protéger. Moi, j'étais trop sur de ma force...et toi, tu ne veux pas voir la tienne. Je ne te demande pas de changer du jour au lendemain, mais tu n'es presque plus une petite fille, tu dois trouver d'autres buts."

Le regard de Sendo se voulait rassurant, mais ses paroles étaient surement très dures pour une gosse. Mais en même temps, s'il lui disait ces choses, c'est qu'il avait confiance en son intelligence.

"Tu vas avoir une mission, comme les grands. Comme Koto, comme Masako, comme moi. On va partir ensemble, et je ne veux pas d'un boulet ! Je veux quelqu'un sur qui je peux compter...sinon ma vie sera en danger. Tu es prète à être mon garde du corps Hime-chan ?"

Bien sur, sa dernière tirade fut accompagnée par un tao du tigre et un bonbon qu'il agita devant le petit nez de la princesse. Les yeux vides du déserteur n'avaient pas quittés ceux trop expressifs de minipouce, mais allait-elle accepter le fait d'avoir des responsabilités.

"J'ai besoin de toi, Miho."

Les paroles de Sendo faisaient mal au coeur, comme une crampe, et Miho commença à chouiner, secouée par des souvenirs douloureux, mais aussi par l'absence d'expression sur le visage du chef du déserteur alors qu'il parlait de la mort comme s'il parlait du beau temps. Un masque de marbre, c'était tout ce que la gamine arrivait à voir sur le visage de Nukekage, il méritait bien d'être appelé Kabe-sama.

Tu es prète à être mon garde du corps Hime-chan ?"

La petite fille hocha légèrement la tête, sécha ses larmes. Sendo n'avait pas l'air de plaisanter, pourtant ça ressemblait un peu à une blague. Il disait ça pour la consoler ? Il n'en avait pas l'air, d'ailleurs s'il voulait la consoler, il la prendrait dans ses bras, comme le faisait Ryoko, comme l'avait fait Hageshii, comme l'avait fait Muttsuri, aussi. Là c'était différent, il voulait vraiment qu'elle serve à quelque chose, qu'elle fasse quelque chose d'utile, qu'elle ait une responsabilité importante.

"J'ai besoin de toi, Miho."

Quelqu'un avait vraiment besoin d'elle. Et c'était du jamais vu pour la gamine. Enfin si, elle s'était déjà battue contre un imbécile à Konoha, avec Ryoko, mais elle s'était blessée et son papa avait dû arrêter de se battre. Elle avait été un poids mort, et n'avait réussi qu'à blesser faiblement son adversaire, grâce à un Katon surpuissant qu'elle n'avait plus, maintenant. Mais cette fois, Kabe-sama voulait son aide, et elle n'allait pas le décevoir. Elle avait progressé, depuis, même Rafiki-kun l'avait remarqué. Cette fois, elle ne serait plus inutile, et elle ne se mettrait pas à pleurer. Et elle ne se cacherait pas les yeux quand quelqu'un allait mourir. Elle s'entraînerait pour pouvoir regarder dans les yeux celui qui avait tué son Otousan, avant de l'égorger comme un porc.

* Tu es de plus en plus romantique, miho-chan... *
* Mph... *

La gamine sortit de ses sombres pensées, et attrappa le bonbon que lui tendait Sendo avec un petit sourire en coin, et un petit "merci".

- D'accord, je veux bien aller me promener avec toi, Kabe-sama. Attends, je vais juste chercher quelque chose...

La gamine partit en courant à la vitesse d'une fusée, et revint, quelques minutes plus tard, avec un petit sac sur le dos, et un singe accroché au sac. Plus aucune trace de larme n'était visible sur son visage, et seuls ses yeux encore un peu rougis mettaient un bémol à son enthousiasme.

- Ca y est, je suis prête, Kabe-sama. On va où ?

Une nouvelle fois, le Nukekage fut surpris par la vitesse de la gnominette qui allait déja préparer ses affaires...elle devait être impatiente et surtout bouillir d'envie d'être utile pour son village. Elle revint quelques minutes plus tard, avec tout son barda. Sendo se leva et enfila un kimono par dessus son short, il était prét. Son bras était toujours en écharpe, et sa mobilité s'en voyait vraiment réduite, mais Miho allait l'aider, ça devrait aller.

- Ca y est, je suis prête, Kabe-sama. On va où ?

"On va a Ame no kuni. Tu verras, c'est chouette. Il fait chaud et il pleut, mais c'est un jolie pays."

Sendo attrapa quelques pansements qu'il fourra dans sa sacoche, ainsi qu'une tente minuscule. Ses rouleaux de parchemins étaient accrochés à son sac par un astucieux système de poches.

"On doit accomplir une mission. Notre commanditaire est un seigneur féodal d'Ame No Kuni. Tu sais, Ame est en trouble en ce moment. Le roi vient de mourir et n'ayant pas de fils, deux seigneurs veulent prendre sa succession. Nous allons donc éliminer un des deux daymios. Mais il a surement du penser la même chose et engager des shinobis d'un autre village pour sa protection, donc ce ne sera pas facile."

Les yeux du Nukekage clignèrent, son bras lui faisait un mal de chien.

"Prète ?"

Miho n'avait jamais été plongée dans la politique, mais, vu comme ça, rien ne semblait plus compliqué que dans les histoires de monstres : il y avait deux adversaires, un gentil et un méchant, il fallait tuer le méchant mais pour y arriver, il fallait d'abord éliminer tous les gens qui seraient responsables de sa protection. Et le combat contre le vrai méchant, c'était un peu comme les Boss, il fallait avoir tué plein de petits nuls avant. Tout ça avait l'air sympathique...

* Chouette, du sang ! Ils goûteront à mes griffes et mes crocs. *
* Pfff, tu penses qu'à ça, toi... Ca craint. Moi je pense plutôt aux jolies Singettes qu'il y aura sûrement là bas... *
* Ah, c'est mieux ! *

Miho espérait sincèrement que Rafiki et Sherkan seraient sages pendant le trajet, mais à priori ils le seraient : la perspective de rencontrer une Rafikinette à Ame réjouissait profondément le petit singe, et celle de trancher la gorge à quelques combattants mettait Sherkan en transe. Miho, quand à elle, était ravie de la petite promenade que cela allait inévitablement causer, et aussi de passer du temps avec Kabe-sama, et puis d'avoir une vraie mission, parce que c'est la classe, quand même. Avec une expression joyeuse, la petite princesse tapa dans la main du Nukekage.

- Prête, Kabe-samaaaaa ! T'as pris des bonbons, hein ?

Et ils partirent vers le village de la pluie.

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